Des bougies dont les flammes vacillent, dansent avec une certaine finesse de gauche à droite. Une musique classique à mi chemin entre le jazz et la variété aux consonances françaises rythme la pièce plongée sous une lumière éclairée et agréable. Pinceau dans la main, ton mouvement de main est aussi gracieux que pourrait l'être une chorégraphie de doigts sur le clavier d'un piano. Tes yeux d'une couleur particulière sont imprimés sur la toile, la précision qui se dégage de ton esquisse. Palette de peinture dans ton autre main, assise en tailleur sur un tabouret en bois, tu penches légèrement la tête sur le coté comme apprivoiser ton œuvre sous un certain angle. Un maigre sourire s'inscrit sur tes traits venant égailler ton visage sous un aspect plus solaire, rayonnant. S'il n'y avait que cela pour te faire sourire alors tu embrasserais ce monde sans le moindre regrets, sans un regard en arrière mais cela était impossible. Une myriade de sentiments illusoires, juste une sensation agréable d'entrevoir la réalité d'une manière différente. La porte d'entrée claque de manière tonitruante laissant deux voix rauques s'élever. Parmi elles, tu reconnais le rire coutumier de ton frère ce qui te ramène à l'instant précis, loin de sa songerie passagère. Tu te lèves en déposant ta palette de peinture sur la petite table en bois – prévu à cet effet – avant de souffler sur les trois bougies allumés dans le salon. Marcus s'avance dans le salon venant à ta rencontre avant de te serrer dans ses bras, toujours cet éternel éclat protecteur l'accompagnant. Il avait joué tellement de rôles auprès de ta personne, celle des parents absents, de l'oreille attentive, du frère soucieux tout un éventail de facettes qui subsistaient encore aujourd'hui. « Tu vas bien ? ». Te demande-t-il tout en observant le pinceau dans ta main, une chemise à carreaux bleu et rouges qui abritait quelques taches de gouaches. Il hoche lentement la tête suivit d'un sourire entendu. Il fait signe à son compagnon de venir alors qu'il rejoint le coin cuisine de l'appartement que tu occupes. Il est beaucoup plus spacieux que celui que tu louais avant mais depuis que tu vis de nouveau avec ton frère, il a fallut effectué quelques changements dont celui d'acquérir un nouveau logement. Tu avais insisté pour payer une partie de loyer quand bien même ton frangin avait insisté pour le payer dans son intégralité. Néanmoins, vous aviez passer un accord : il payait le loyer, tu t'occupais des facture restantes. Un deal qui avait contenté les deux parties mais pour autant, tu sais qu'il ne peux s'empêcher d'assurer tes arrières, là dessus tu ne pourrais le changer. Le jeune homme qui accompagne s'aventure a son tour à lui de son frère non sans arrêter ton regard sur ta personne, te détaillant de haut en bas comme on peut étudier une marchandise ou bien une nouvelle voiture. Tu fronces légèrement les sourcils avant de secouer la tête et de rejoindre la cuisine où tu ouvres la porte du frigo pour chercher une bouteille d'eau. « Bran, je te présente ma sœur Cait, Cait voici Bran. Tu te souviens je t'ai parlé de lui l'autre jour ... ». Te dit-il en observant ta réaction avant de disparaître dans la salle de bain. Maintenant que ton frère te le rappelle, tout te revient en mémoire. Il s'agissait d'un ami de longue de ton frère, âgé de quelques années de moins, presque la trentaine mais pas encore. D'origine américaine, il avait fait ses études au pays, enseigné dans l'une des plus prestigieuses écoles supérieures en France avant finalement d'accepter une place à Cambridge. Ton frère n'avait rien de plus sur son sujet, si ce n'est qu'il avait besoin d'un nouveau départ. Un passé douloureux, désireux de l'effacer ? Peut être bien après tout cela lui était personnel. « Je prends une douche rapide et on pourra y aller ! ». Tonne ton frangin à l'autre bout de l'appartement, la porte se ferme. Le dénommé Bran se laisse tomber sur l'un des tabourets derrière le comptoir de la cuisine, en soupirant sans pour autant te quitter du regard. « Adepte au classique, expression  réfléchit derrière un esprit songeur, l'artistique sommeil en toi. ». Une voix posé et chaleureuse à la fois, il aurait pu être un conteur s'il le voulait. Ce que tu voyais néanmoins devant toi c'était surtout l'image d'un charmeur invétéré et son statut de professeur de littérature anglaise devait bien aider. Tu t'avances vers le chaîne hi-fi pour baisser le son de la musique tout en secouant la tête quelque peu agacée. Ton silence semble lui être amusant mais également une source de traduction qui t'échappe. « Pourquoi tu éteins ? ». Tu hausses les épaules avant de revenir dans la cuisine pour t'activer à préparer le repas même si ton frère  rentrera probablement tard, tu sais qu'il sera bien heureux de manger et puis de ton coté tu as une faim de loup. « J'écoute pour me détendre, c'est un peu plus qui éveille l'inspiration sur la toile. ». Dis-tu en relevant la tête en direction du chevalet et de la toile que tu avais commencé à peindre. Bran ne te quitte pas du iota comme si tu venais de parler une langue étrangère.    « Marcus m'a dit que vous aviez accepter un poste à Cambridge ? ». Ta question étant destinée à alléger l'ambiance, tu te rends compte rapidement qu'elle est aussi à la fois curieuse et indiscrète d'une certaine façon. Il esquisse un rire amusé mais calme avant de reporter son attention sur toi. « C'est ça, et à ce que j'ai entendu de toi tu es plutôt douée dans ton domaine d'études. ». Son assertion était sincère bien que curieuse. Décidément la curiosité est un vilain défaut de l'âme humaine mais que l'on aime à user. La peinture était une passion, une activité personnelle que appréciais mais ton ambition professionnelle ne pouvait se limiter à l'incertitude. Travailler dans le domaine artistique oui, mais tu ne penses pas avoir assez de talent pour cela et ta rationalité te poussait à vivre dans le concret et non dans l'abstrait. Il s'attarde – un peu trop longtemps  à ton goût – sur toi, son regard confiant et communicatif s'accrochant au tien. La porte de la salle de bain s'ouvre à nouveau sur Marcus, qui rompt le silence étrange et électrique qui régnait quelques minutes, secondes auparavant. « De quoi vous parliez ? ». Tu reprends ta tâche d'éplucher des légumes, Bran se tournant vers ton frère, un sourire de loup accroché à ses lèvres. « On fait plus ample connaissance. ». Marcus s'approche de son camarade tout en enfilant sa chemise et piquer un morceau de légumes cru que tu venais de couper. « Tu viens avec nous ? Bran se produit dans un bar ... ». Dit-il en rigolant. Décidément, le fameux ami de ton frère avait plus d'une corde à son arc, en plus d'être professeur il semblait être artiste dans l'âme. Il te gratifie d'un clin d’œil emplit de mystère et de réserve avant de boire dans la bouteille que tu avais ouvert un peu plus tôt.